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La sécheresse de 1976 en France : Des similitudes avec 2022 ?

vendredi 15 avril 2022

Les sols de nombreuses régions complètement asséchés durant l'été 1976 - Météo-Villes

 

 

Retour sur la sécheresse de 1976 :

 

Il y a 46 ans, la France connaissait l'une des sécheresses les plus importantes de son histoire avec des conséquences marquées au niveau de l'agriculture et de l'économie du pays. Les précipitations se sont montrées très déficitaires durant de nombreux mois en raison de conditions anticycloniques durables et récurrentes, et ce dès la fin de l'année 1975. Les mois de novembre et décembre 1975 furent déjà particulièrement secs avec un anticyclone des Açores se montrant bien ancré sur la France et des perturbations quasiment absentes durant plusieurs semaines.

 

Si un temps sensiblement perturbé est observé sur la France entre janvier et mars, les précipitations ne suffisent pas à combler le déficit des mois précédents, d'autant plus que la situation s'aggrave pour le printemps 1976. Cette période est en effet la plus sèche observée en France depuis au moins 100 ans de mesures en raison une nouvelle fois de conditions anticycloniques très récurrentes et durables. La chaleur s'accentue dès le début du mois de mai et il fait déjà plus de 30°C entre le 7 et le 8 sur la Normandie, la Picardie, la Région parisienne, la Champagne et la Lorraine.

 

Le soleil et l'air chaud permettent d'assécher progressivement les sols superficiels et déjà les prémices d'une sécheresse importante se font sentir avant l'été. On relève en effet moins de 25 % de pluie efficaces sur la période septembre 1975/mai 1976 au Nord de la Loire.

 

Déficit important de précipitations durant la période de recharge septembre 1975/mai 1976 sur la France – Météo-Villes

 

 

La situation s'aggrave encore durant le mois de juin avec un temps très chaud et sec persistant sur une large moitié Nord et Ouest du pays. Paradoxalement, la situation est bien plus instable sur le Sud avec de violents orages récurrents entraînant des cumuls parfois très importants, dépassant les 100mm sur le Sud des Alpes contre en moyenne entre 2 et 5mm sur le Nord.
 

Cumuls de précipitations observés en juin 1976 sur la France – Météo-Villes

 

 

A la fin du mois, la sécheresse est telle que le vieux rite des Rogations (procession religieuse pour demander de l'eau au ciel) est de nouveau mis en place dans le Médoc. Sur le Nord, certains villages observent déjà des pénuries d'eau durant plusieurs jours et les cultures souffrent de plus en plus des sols asséchés alors que le Rhône est à gué près de Lyon.

 

Reprise du rite des Rogations dans le Médoc à la fin du mois de juin 1976 – Météo-Villes

 

 

Le mois de juillet est globalement du même acabit alors que la chaleur est parfois intense en début de mois. On relève en effet souvent plus de 30°C sur une large partie de la France, parfois près de 40°C sur le Sud-Ouest.

 

L'anticyclone des Açores reste en effet bloqué sur la France et apporte de l'air chaud et sec sur la majorité du pays entre les mois de juin et juillet. Les cumuls restent de ce fait dérisoires et les plus importants sont souvent observés sous des orages localisés. Ainsi, la sécheresse s'accentue encore et toujours, notamment sur la moitié Nord où l'agriculture souffre énormément du manque d'eau en raison de restrictions de plus en plus étendues et de nappes phréatiques offrant des niveaux beaucoup trop bas.

 



Sécheresse agricole particulièrement marquée de l'été 1976 dans les Côtes d'Armor – L'Express

 

 

Après une courte période plus fraîche et sensiblement plus instable à la fin du mois de juillet, le temps sec s'est de nouveau imposé sur une large majorité du pays pour le mois d'août avec un soleil dominant mais une chaleur moins accablante qu'au début de l'été. En raison de la végétation et de l'air très secs, des incendies parfois très importants se déclenchent entre l'Ouest et le Nord du pays.

 

Important incendie ravageant plus de 1000 Ha de forêts à Royan en août 1976 – C-Royan

 

A la fin de l'été 1976, les conséquences de la sécheresse sont telles que le gouvernement instaure un impôt sécheresse pour couvrir les pertes immenses de l'agriculture française. Celui-ci prévoit en effet une hausse de 4 à 8% de l'impôt sur le revenu au-dessus d'un seuil défini, une aide gouvernementale à hauteur de 2,2 milliards de francs est également instaurée.

 

Le 25 août 1976, le gouvernement annonce la mise en place d'un impôt sécheresse – Météo-Villes

 

 

La situation ne s'améliorera sensiblement qu'à la fin de l'année 1976 avec le retour de conditions plus durablement perturbées. Il faudra cependant attendre l'année suivante pour que les sols et les nappes phréatiques retrouvent des conditions plus « normales ».

 

Rapport à la normale des précipitations sur la France entre juillet 1975 et juin 1977 – Météo-France

 

 

Les conséquences de cette sécheresse furent exceptionnelles sur la France avec des pertes commerciales s'élevant à plus de 4 milliards de francs et une perte de croissance de 0,5%. De nombreuses aides humanitaires et commerciales ont également été entreprises par l'armée et le gouvernement durant la période, notamment durant l'été.

 

La sécheresse de 1976 restera gravée dans les mémoires comme l'une des plus grandes calamités qu'ai connu l'agriculture française, une telle situation reste toutefois exceptionnelle.

 

 

Sécheresse de cette année 2022 : Des similitudes avec 1976 ?

 

Le spectre de la sécheresse inquiète depuis plusieurs mois sur la France avec des conditions calmes et anticycloniques très récurrentes et un manque d'eau parfois important, notamment depuis la fin d'année 2021 selon les régions.

 

Le temps majoritairement sec avait d'ailleurs débuté dès la fin de l'été 2021 avec un déficit pluviométrique récurrent sur la France. Celui-ci s'élevait en effet à -38% en août 2021, -8% en septembre, -10% en octobre et -31% en novembre, seul le mois de décembre avait été excédentaire avec des cumuls parfois très importants et des inondations sur le Sud-Ouest du pays.

 

 

Cette tendance sèche s'est ensuite prolongée durant les premiers mois de l'année avec un déficit touchant la quasi-totalité de la France entre janvier et avril, atteignant -30 à -40% sur une large moitié Ouest, et centre du pays et jusqu'à -70 voire -80% sur le Sud-Est.
 

 

Rapport à la normale des cumuls de précipitations du 1er janvier au 12 avril 2022 en France – Météo-France

 

 

C'est notamment sur le Sud-Est que le manque d'eau est le plus flagrant, la région PACA a en effet connu son début d'année le plus sec depuis 1959 avec un cumul moyen de 64mm à l'échelle de la région du 1er janvier au 11 avril, battant les 75mm du début d'année 2005. Une situation d'autan plus inquiétante que la fin d'année 2021 s'était déjà montrée anormalement sèche sur le secteur, tout comme sur d'autres régions.

 

La saison de recharge (septembre à mars) s'est en effet montrée déficitaire sur une large partie de la France. Ces déficits sont plus nets sur l'Ouest, le Nord-Est de la France, atteignant par exemple 40% près du Poitou et du Sud du Massif Central et jusqu'à 50% sur l'Alsace et la Côte d'Azur.

 

Rapport à la normale des cumuls de précipitations durant la période de recharge de septembre 2021 à mars 2022 – Météo-France

 

Seuls les secteurs allant des Pyrénées au Sud de la Bourgogne et au centre ont vu des cumuls se rapprochant des normales ou excédentaires, ce qui reste peu à l'échelle de la France.

 

Ainsi, le manque d'eau se fait de plus en plus remarquer sur de nombreuses régions en ce printemps 2022, notamment sur le Sud-Est et l'Ouest. L'indice d'humidité des sols est de ce fait bas à l'échelle de la France même si une légère amélioration a été observée au Nord suite aux précipitations de la première décade d'avril. Celui-ci se situe néanmoins à un record bas sur la région PACA en cette mi-avril 2022.

 

Évolution de l'indice d'humidité des sols sur la France entre le 1er janvier et le 30 mars 2022 – Météo-France

 

 

Du côté des ressources en eau souterraines, les nappes phréatiques affichent des niveaux très hétérogènes au 1er avril 2022 sur la France. On constate que les niveaux sont bas et encore régulièrement en baisse entre l'Est et l'Ouest du pays, autour de la moyenne sur le Nord et le Languedoc et modérément hauts sur le Sud-Ouest.

 

Niveau des nappes phréatiques par rapport à la normale au 1er avril 2022 - via BRGM

 

Comme évoqué précédemment, c'est sur le Sud-Est que la situation est la plus inquiétante avec des sols sec et assez pauvres en eaux souterraines avant le début de la saison estivale. On note également que la sécheresse s'accentue jusqu'en profondeur sur l'Est et l'Ouest du pays où les précipitations de ces derniers mois n'ont pas été suffisantes pour permettre une recharge en eau efficace. Des restrictions d'eau sont d'ailleurs déjà en vigueur sur de nombreux secteurs, chose peu fréquente en avril.

 

Restrictions d'eau en France au 15 avril 2022 - Propluvia

 

 

La situation pourrait donc présenter des similitudes sur certaines régions avec l'épisode de 1976 mais reste tout de même globalement moins critique que ce qui pouvait déjà être observé au printemps de cette même année. Il est également important de noter que la sécheresse de 1976 n'avait pas concerné les abords de la Méditerranée alors que cette zone semble la plus à risque d'une sécheresse très importante pour cette année 2022.

 

Il va devenir vital pour les régions du Sud-Est, du Centre-Est et du Centre-Ouest que les précipitations se montrent plus fréquentes et importantes avant l'été, auquel cas la sécheresse pourrait se montrer sévère durant la période estivale sur ces secteurs. Les prévisions pour les prochains mois ne semblent pas s'orienter vers un retour durable de fréquentes précipitations même si le mois de mai pourrait présenter un peu plus d'instabilité selon certains scénarios, notamment au Nord.

 

Prévision des anomalies de précipitations pour les mois de mai et juin sur l'Europe (cliquer sur la carte pour l'agrandir) – Modèle américain CFS

 

 

Prévision des anomalies de précipitations pour les mois de mai et juin sur l'Europe (cliquer sur la carte pour l'agrandir) – Modèle Européen ECMWF

 

 

 

Si à l'échelle de la France, la situation n'est pas véritablement comparable à l'exceptionnelle sécheresse de 1976, le manque d'eau de ces derniers mois pourrait tout de même engendrer un épisode très notable sur certaines régions françaises d'ici l'été. La situation sera à surveiller de très près dans les prochaines semaines sur le Sud-Est, une large partie du Centre-Est mais également le Centre-Ouest du pays.

 

 

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